Le CRIC se met à l’heure de la diversité et du handicap à travers une exposition de la peintre Mina Saouti
Le CRIC (Centre Régional d’Intégration de Charleroi) accueille régulièrement à ses cimaises les œuvres d’artistes dont il tient à mettre le talent en exergue, mais aussi chez lesquels il détecte une dimension humaine particulière. Mina Saouti ne fait pas exception à cette règle. Avec son parcours de vie atypique, elle en est même plutôt l’incarnation. Cette peintre autodidacte y propose donc, jusqu’au 15 novembre, à la fois une trentaine de tableaux et l’expression très personnelle d’un parcours de vie tout à fait singulier.
À travers cette exposition intitulée « Arts – Évasions », le CRIC met une nouvelle fois en valeur un travail artistique et une personne dont le destin est un peu hors du commun. Née au Maroc, Mina Saouti voit son père quitter son emploi dans une base aérienne au Maroc pour les mines belges, poussé par des raisons économiques. On est en 1964 et, comme dans beaucoup de cas de ce type, la famille, composée de la maman et des trois enfants, rejoint, un an plus tard, le père parti en éclaireur vers l’inconnu. Mais, à cette époque, le sort a déjà frappé Mina. À deux ans, elle a contracté la poliomyélite au Maroc, maladie qui la prive définitivement de l’usage de ses jambes. L’enfant est soignée pendant un an dans un hôpital bruxellois, poursuit une longue revalidation de la même durée dans un autre hôpital, puis se lance dans la vie au départ de Montignies-sur-Sambre où elle réside avec sa famille.
Une forme de thérapie personnelle
Autodidacte, Mina Saouti est aussi une forte personnalité. Poussée à se dépasser en permanence par sa mère dont le portrait trône à une place privilégiée dans chacune de ses expositions, elle a fait de la peinture une forme de thérapie personnelle. Chacun de ses tableaux est porteur d’un message fort qui tend vers un bousculement des mentalités.
Venue tardivement à ce mode d’expression, puisqu’elle n’a pris pied dans le monde de la peinture qu’en 2016, l’artiste a déjà une ligne directrice qui parcourt son œuvre. Ses toiles sont toutes le ressenti d’une émotion. Elles se partagent entre visages figés dans un expression et paysages la plupart du temps oniriques. Les traits sont tout en rondeur, mais les mines sont graves. Les pleurs sont des signes de douleur. Une bouche cousue est l’expression du silence des gens qui souffrent. Un visage féminin à moitié dissimulé derrière un chapeau symbolise le fait que beaucoup de femmes portent un masque pour cacher leur souffrance. Mina Saouti aime aussi beaucoup peindre les femmes africaines pour lesquelles elle affirme avoir beaucoup d’affection car elle trouve qu’elles ont énormément de dignité malgré tout ce qu’elles subissent.
Des aménagements concrets
Pour le CRIC, cet accueil d’une première artiste non valide est une démarche à la croisée de la diversité, qui est sa thématique originelle avec la promotion des personnes étrangères ou d’origine étrangère, et du handicap qui est une dimension qui lui est moins familière. Une dimension à laquelle il est aussi concrètement moins confronté. C’est la raison pour laquelle le centre a profité de l’occasion pour opérer quelques adaptations de ses structures. Cet événement l’a, en effet, amené et motivé à doter son parking d’un emplacement réservé aux handicapés, ses abords d’une allée de dalles utilisables par les personnes qui se déplacent en fauteuil roulant et sa porte d’entrée principale d’une rampe d’accès. Des aménagements qui constituent un plus définitif pour le centre régional.
À noter que l’exposition de Mina Saouti est accessible, du lundi au vendredi de 9h à 16h (visites sur rendez-vous), dans les locaux du CRIC, 23, rue Hanoteau à 6060 Gilly. Infos : 071/20 98 60.
Dominique Watrin