Lire et Écrire attire l’attention du grand public sur « les oubliés du numérique » à travers quatre spots vidéo
Les experts se sont exprimés de manière unanime sur le sujet : la crise du coronavirus et les bouleversements de comportement qui en ont découlé ont crûment mis en lumière une accentuation de la fracture numérique, une expression désormais courante qui définit la disparité d’accès aux technologies informatiques au sein de la population. Et il n’est un secret pour personne que nombre de migrants figurent parmi ces laissés-pour-compte. De quoi inciter les centres régionaux d’intégration et leurs partenaires à jeter un coup de projecteur sur l’initiative de Lire et Écrire centrée sur ce thème.
Mouvement très connu et très actif dans le monde associatif, Lire et Écrire a fait de l’alphabétisation son combat permanent qu’il mène depuis sa création en 1983, date à laquelle quatre associations de formation continue et d’éducation permanente ont décidé de concert de porter ce projet sur les fonts baptismaux. Fort de ses huit régionales wallonnes, de ses cinq centres alpha bruxellois et de ses trois coordinations (wallonne, bruxelloise et au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles), ce mouvement d’Éducation permanente enchaîne les activités de terrain et les campagnes d’information et de sensibilisation pour faire progresser sa cause et la mettre en lumière. À l’occasion de la récente journée internationale de l’alphabétisation programmée chaque année le 8 septembre, elle a clôturé une campagne de sensibilisation choc, ancrée dans l’actualité brûlante, qu’elle a baptisée « Les oubliés du numérique ».
Mettre en scène une réalité
La nouvelle campagne est composée de quatre séquences vidéo mettant en scène Rosa, une oubliée du numérique qui ne sait ni lire ni écrire, comme une personne sur dix aujourd’hui en Belgique. Dans ces quatre épisodes de moins d’une minute, la jeune femme est confrontée à des tâches en apparence simples auxquelles elle ne peut faire face, faute de savoir lire et écrire. Et les obstacles défilent au gré des situations du quotidien. Comment recharger sa carte de bus sur un guichet automatique, si on ne sait ni lire ni écrire ? Comment prendre un rendez-vous en ligne chez le médecin, si on ne sait ni lire ni écrire ? Comment réaliser des démarches administratives en ligne quand tous les accueils sont fermés durant la crise sanitaire, si on ne sait ni lire ni écrire ? Comment regarder les annonces sur Internet ou envoyer sa candidature par e-mail, si on ne sait ni lire ni écrire ?
L’argumentaire de Lire et Écrire qui se cache derrière l’organisation de cette nouvelle campagne est aussi clair qu’imparable. Il s’agit avant tout de mettre en scène une réalité concrète et d’expliquer au grand public le vécu quotidien des oubliés du numérique, c’est-à-dire toutes ces personnes piégées par la dématérialisation brutale et généralisée d’un grand nombre de services et d’activités, un glissement qui constitue pour elles une mise à l’écart de la société.
Faire prendre conscience
À travers cette série de messages visuels chocs, le mouvement dénonce de manière particulièrement explicite les exclusions dont les personnes en difficulté de lecture et d’écriture sont de plus en plus victimes à l’heure de l’accélération du tout au numérique. Faire prendre conscience de cet état de fait à l’ensemble de la population, mais aussi aux responsables politiques, est considéré comme primordial aux yeux de ses responsables. Selon eux, cette prise de conscience est capitale pour éviter l’accentuation de l’exclusion de différentes catégories de la population au sein desquelles prennent place de nombreux migrants. En fait, tous ceux pour qui, comme le stipule le mouvement, le numérique est plus problématique que fantastique…
Dominique Watrin