Le bilan 2022 de Fedasil : une hausse record du nombre de demandes de protection internationale
Pour Fedasil, l’agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile, comme pour d’autres organismes du secteur, chaque année, le moment du bilan de l’exercice écoulé revêt une importance non négligeable. Pour mesurer le chemin parcouru, et de préférence les avancées enregistrées dans les thématiques dont elle a la responsabilité, mais aussi pour ajuster ses actions et revendications en fonction des données récoltées et analysées. La version 2022 n’échappe pas à la règle, avec un focus sur une année marquée par la saturation de son réseau d’accueil.
Pour rappel, Fedasil est l’instance qui est responsable de l’accueil des demandeurs d’asile, c’est-à-dire les demandeurs de protection internationale, et d’autres groupes cibles et, à ce titre, elle garantit la qualité et la conformité des diverses modalités d’accueil. Elle exerce cette fonction sous la tutelle du Secrétariat d’État à l’Asile et à la Migration. Elle prépare notamment ses résidents à la vie après l’accueil, assure la coordination des différents programmes de retour volontaire et met en œuvre les engagements pris dans le cadre de programmes internationaux, tels que la réinstallation et la relocalisation. Le bilan qui est publié dans un document de 28 pages recense les événements et les statistiques de l’année 2022, en matière d’accueil, de réinstallation et de retour volontaire.
Près de 37000 demandes de protection internationale
Selon son rapport, Fedasil et ses partenaires gèrent aujourd’hui près de 35000 places d’accueil, un presque record, selon ses dires, au cours de cette année où elle a fêté ses vingt ans d’existence. Au-delà des événements marquants qui ont jalonné l’exercice, c’est le bilan chiffré de son travail d’accueil qui attire l’attention. Et en 2022 précisément, près de 37000 demandes de protection internationale (36871 exactement) ont été enregistrées en Belgique, soit une hausse exceptionnelle de 40% par rapport à 2021. Cette augmentation vertigineuse a mis une pression supplémentaire sur le réseau d’accueil de Fedasil, d’autant que le nombre de départs des centres d’accueil a été inférieur à celui des arrivées, en raison de l’allongement de la durée des procédures d’asile et de séjour.
Pour affronter ce défi, plus de 4000 places d’accueil ont été créées dans l’urgence en 2022, avec notamment l’ouverture de 14 centres d’accueil, dont 7 fédéraux (à Bredene, Bruxelles, Dilbeek, Jabbeke, Machelen, Molenbeek et Theux). La hausse des arrivées a aussi concerné les MENA (Mineurs Etrangers non Accompagnés), principalement des jeunes garçons, âgés de 15 à 17 ans, originaires d’Afghanistan. Face à ce phénomène, Fedasil a augmenté sa capacité d’accueil de ce public spécifique de plus de 500 places, portant celle-ci à 3231 places. Par ailleurs, l’afflux de personnes ukrainiennes ayant fui leur pays a amené l’Office des Étrangers à délivrer plus de 60000 attestations de protection temporaire en 2022. Un total de 16000 d’entre elles (soit environ 1 sur 4) ont été orientées vers un logement temporaire par Fedasil.
Une énorme pression subie par le réseau d’accueil
Au cours de l’exercice écoulé, ce sont, au final, 34772 demandes d’accueil qui ont été enregistrées, dont 23532 ont été effectivement accueillies et 11240 non accueillies pour diverses raisons (personnes qui ne souhaitent pas bénéficier d’une place d’accueil, personnes en liste d’attente faute de place, etc.). L’analyse chiffrée de l’occupation du réseau d’accueil attestent de l’énorme pression qu’a subie celui-ci. Car, si ce dernier a enregistré 23530 entrées, il n’a enregistré que 19389 sorties, soit un solde excédentaire de 4141 personnes accueillies. Du côté de l’évolution de la capacité d’accueil, si la partie concernant l’accueil structurel est restée stable autour de 17 à 18000 places, au cours des dix dernières années, la capacité d’accueil temporaire a sans cesse augmenté au cours des cinq dernières années. En 2022, le taux d’occupation des centres a été relativement stable, passant néanmoins de 93% en début d’année à 95% au terme de l’exercice.
Sans surprise, fin 2022, l’essentiel des 33499 places d’accueil effectives se situaient en logements collectifs (centres fédéraux, Croix-Rouge, etc.) avec 24950 places, en logements individuels (CPAS, Ciré, etc.) avec 5220 places et, dans une moindre mesure, en accueil en première phase (Centres d’arrivée, COO pour MENA, etc.) avec 2769 places. Fin 2022, la contribution des opérateurs à cet accueil concernait principalement, dans l’ordre, Fedasil (11493 places), La Croix-Rouge francophone (8395), Rode Kruis Vlaanderen (5847) et les CPAS (4713).
Une majorité d’hommes isolés
Au niveau du profil des personnes accueillies, celles-ci se répartissaient entre des hommes isolés (43%), des personnes en famille (40%), des MENA (10%) et des femmes isolées (7%). On y répertoriait, par ailleurs, 71% d’hommes pour 29% de femmes, tandis qu’il y avait 70% d’adultes pour 30% de mineurs d’âge. Sur le plan du motif de la demande d’accueil, l’écrasante majorité (94%) étaient des demandeurs de protection internationale dont le dossier était en cours de traitement. Enfin, les quatre pays d’origine les plus représentés étaient, dans l’ordre, l’Afghanistan (26%), la Palestine (10%), le Burundi (9%) et la Syrie (7%).
De son côté, le profil des MENA recensait 96% de garçons pour 4% de filles. Sur le plan des catégories d’âge, une importante majorité relevait des 16 ans et plus (79%), suivie par les 12-15 ans (20%), et les 11 ans et moins (1%). Les quatre nationalités majoritaires étaient les nationalités afghane (74%), syrienne (8%), somalienne (4%) et érythréenne (4% également).
Le nombre de bénéficiaires du programme de réinstallation en net recul
Depuis 2013, la Belgique est dotée d’un programme structurel de réinstallation sur base duquel notre pays s’engage à accueillir chaque année un contingent de réfugiés vulnérables, en fonction des priorités européennes et nationales. En 2022, seulement 71 personnes ont rejoint notre pays, via ce programme. Il s’agissait essentiellement de Syriens en provenance de Jordanie, d’Égypte et du Liban. Ce chiffre est en recul spectaculaire par rapport aux années précédentes qui ont connu des pics en 2021 (près de 900), 2018 (un peu moins de 900) et surtout 2017 (plus de 1300).
Par ailleurs, en 2022, Fedasil a accompagné 2673 personnes dans le cadre d’un retour volontaire dans leur pays d’origine. Ce chiffre est en hausse de 36% par rapport à celui de 2021, revenant à la moyenne d’avant la crise sanitaire du coronavirus. Près de la moitié des personnes concernées (52%) étaient des individus sans titre de séjour en Belgique, contre 29% de demandeurs de protection internationale et 19% de demandeurs déboutés. Pas moins de 94 pays de destination étaient concernés. Les principales nationalités étaient la brésilienne (641 retours), la Mongolie (363), l’Ukraine (198), la Moldavie (192), le Salvador (125) et la Géorgie (100). À noter que 74% de ces migrants (1970 exactement) ont bénéficié d’un soutien supplémentaire destiné à leur permettre de se construire un nouvel avenir au pays.
Le profil de ces bénéficiaires retournées volontairement en 2022 était celui de personnes en famille (51%) et d’hommes (56% pour 44% de femmes). Leur répartition par catégories d’âge était, elle, relativement équilibrée avec 37% de 18-35 ans, 26% de 36-50 ans, 25% de 0-17 ans et 12% de + de 51 ans.
Dominique Watrin
Le bilan 2022 Accueil – Réinstallation – Retour volontaire de Fedasil est consultable et téléchargeable via le lien suivant :